mardi 22 mai 2007

Imaginons.

Imaginons que votre bon sens cède devant votre curiosité. Imaginons qu’excédé vous attrapiez votre téléphone, bonjour mais qu’est-ce que vous me voulez. Imaginons alors ma tête à moi. Tempête, le cœur à deux cents à l’heure, rouge pivoine dans le salon, avec les pieds j’aimerais bien faire une pirouette comme les héros quand ils sont contents et qu’ils s’en vont joyeux à travers champs mais je sais pas faire. Bon sang il m’appelle moi moi moi je me pince je rêve mais oui c’est imaginons on a dit. Ah je m’emballais déjà. Alors imaginons. Qu’est-ce que je vous veux ? Ben travailler avec vous patron, c’est écrit là, en haut. Vous êtes gentille mais mon équipe elle est déjà faite, je vais pas virer quelqu’un pour vous quand même. Ben non patron. C’est pas ce que je vous demande. Alors qu’est-ce que vous me voulez ? Déjà patron je n’arrive pas avec un paquet cadeau tout fait, mon travail avec vous on le définira ensemble. Et puis votre temps est précieux, je ne veux pas vous le faire perdre. Précieux, non, me répondez-vous imaginons. J’aime bien. J’aime que vous doutiez de la préciosité de votre temps. J’aime bien me dire que vous n’en êtes pas avare. Ça me permet de continuer à imaginer. Imaginer que je vous rencontre en vrai. Parce que du temps vous en avez. Du temps pour mes idées, mes désirs que je prends pour des réalités. Une improbabilité de plus, mais, et je sais que vous savez, j’ai un faible pour l’improbable. Qu’est-ce que je vous veux ? Je veux être une petite voix à l’antenne. Attention mademoiselle, au tout début si je vous ai bien suivi, il n’était pas question d’antenne mais d’enquête. Oui patron mais j’ai changé d’avis. Pour des raisons pratiques que je ne développe pas ici car nous imaginons, sinon pensez bien je vous dis tout. Non j’ai envie d’être une voix. J’ai le sentiment qu’elle peut s’ajouter à la vôtre. Une voix pas encombrante qui vous débarrasse d’une épine dans le pied par exemple. Tiens oui imaginons un cas précis, imaginons que les auditeurs soient de plus en plus critiques, qu'ils soient devenus acteurs et auteurs de courriers insensés, parce qu’ils ont entendu que ou qu’ils ont lu que. Je pense : ils sont mignons vos auditeurs. Vous me répondez : non ils sont cons. Imaginons qu’ils soient de plus en plus nombreux à vous écrire des âneries des tripotées d’âneries et que vous crouliez sous les mots lourds d’auditeurs. Les pauvres. Les naïfs. Les insolents. Les imbéciles. Mais les mignons. Faudrait une médiatrice de charme, pour leur proposer des rectificatifs-sur-ondes, des résumés des émissions précédentes, des mais ne soyez pas inquiets, des relais de leurs coup de gueule coup de cœur coup de poing, le tout en trois minutes le tout de bonne humeur. Et en chantant. Allez, patron laissez-moi faire, je m'en occupe. Une lectrice de courrier, une voix sur des maux, et me voici moi. Je suis utile et vous finissez par vous attacher à moi. Vous pensez que j’ai du bagou. Que je suis gonflée quand même. Quel culot celle-là. J’en ai vu des motivées mais des comme ça rarement. Une par an. Imaginons qu’on se rencontre en vrai. Imaginons que vous décrochiez le téléphone. Même que vous avez un peu peur que je fasse le siège devant la maison de la radio. Même que vous flippez d’être tombé sur une hystérique. Ça vous plait. Et moi aussi. Imaginons que votre sale caractère ne me rebute même pas. Imaginons que votre rudesse je réussisse à la dompter. Vous savez bien que je suis morte de trouille mais que je fais mine de. Imaginons qu’on s’entende bien. Qu’on fasse du bon boulot. Que je vous sois une petite bouffée d’oxygène. Imaginons qu’un jour un seul on rigole ensemble. Imaginons.

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